France, 1907 : Perdre son temps, travailler pour rien. Cette expression est attribuée à Voltaire, furieux de l’avarice de Frédéric II qui, l’ayant sollicité, en 1750, de se rendre à la cour de Berlin, lui fit subir quantité de petites avanies. Le roi lui avait promis des appointements de ministre, un appartement au château, le chauffage, deux bougies par jour, sucre, thé, café, chocolat à discrétion. Mais le thé et le chocolat étaient de mauvaise qualité, le café était avarié, le sucre en quantité dérisoire, l’éclairage insuffisant. Sur les plaintes de Voltaire, Frédéric répondit qu’il allait chasser ses canailles de valets qui n’exécutaient pas ses ordres. Il ne chassa personne et rien ne fut changé. Sur de nouvelles plaintes, il répondit :
— Comment, mon cher monsieur de Voltaire, est-il possible que vous vous laissiez distraire de vos idées poétiques par de pareilles misères ?… Ah ! je vous en prie, n’employons pas à ces simples bagatelles les moments que nous pouvons donner aux muses et à l’amitié !… voyons, n’en parlons plus…
C’est ainsi que Frédéric apaisa les réclamations du poète grincheux qui n’oublia pas, à son retour à Paris, de révéler la parcimonie de son royal ami.
— J’ai perdu temps et peine, disait-il, à travailler pour de roi de Prusse.